L’engagement est au coeur de leur activité. Ces femmes et ces hommes s’inspirent du monde pour agir autrement et durablement, et faire de leur environnement une voie d’expression, de créativité, d’innovation ou encore de solidarité. Finance, culture, artisanat, industrie ou médias sont autant de domaines incarnés par ces personnalités, qui ont accepté de se prêter au jeu du questionnaire de Proust en mode La Mèche. Quels sont leurs secrets durables? Pour vous, ils vendent la mèche.
Réalisation: Cornland Studio
Après avoir effectué ses études primaires, secondaires et universitaires aux Etats-Unis, Guillaume commence sa carrière dans la finance en 1989 chez Intel Corporation, d’abord au Royaume-Uni puis en France. Une rencontre fortuite en 1995 le ramène en Suisse, son pays natal, où il poursuit sa carrière dans la banque privée, chez Darier Hentsch & Cie et en tant qu’associé de de Pury Pictet Turrettini. En 2010,il fonde Quadia, une société d’investissement qui lui permet de mettre en avant sa compréhension de ce que la finance devrait et doit réaliser. L’apprentissage de la finance sociale et environnementale lui est apporté principalement par la collaboration heureuse avec des fondations et des ONG de classe mondiale. Aujourd’hui, Quadia est dirigée par une équipe dévouée et très compétente, lui permettant de jouer un rôle plus stratégique au sein de son conseil d’administration et de poursuivre son parcours personnel dans la finance durable à travers umbutu. Guillaume a été élevé par une mère qui, sans le savoir, était la quintessence de ce que signifie l’écologie et qui a profondément ancré en lui les valeurs sociales et environnementales qu’il défend aujourd’hui.
Transcription
Qui êtes-vous et que faites-vous dans la vie?
Je m’appelle Guillaume Taylor et je suis passionné par tout ce qui touche le social et l’environnemental.
Quel est votre état d’esprit actuel?
D’un côté motivé par tout ce qu’on peut faire pour aller de l’avant dans cette durabilité mais en même temps inquiet, mais pas défaitiste. Mais la motivation et la croyance dominent tout état pessimiste.
Quel est votre trait de caractère principal?
Je suis responsable de mes pensées, de mes actions et je ne blâme pas qui que ce soit.
Qu’est-ce que signifie être écolo aujourd’hui?
Etre complètement en phase avec la nature et comprendre que la nature est notre mère, notre professeure et notre guide.
Quelles sont les personnalités qui vous inspirent et pourquoi?
La princesse Irène des Pays-Bas parce que c’est une personne qui est complètement connectée avec la nature, elle a passé six mois seule en Afrique du Sud à communiquer avec la nature. C’est vraiment la personne qui est la locomotive pour moi dans mon parcours vers cet attachement à la nature.
Justement parlons de parcours, comment est venu votre désir d’engagement, quel a été le déclic s’il y a eu un déclic?
Le désir d’engagement est venu de mes tripes et j’ai compris très vite que toute ma compréhension, mes connaissances, ma prise de conscience étaient instinctifs et pas du tout appris. Et j’ai aimé ça.
Comment cet engagement se manifeste chez vous au quotidien?
Beaucoup de travail sur ma conscience individuelle, sur mon état d’esprit et tous les jours de passer à l’action sans trop réfléchir.
Dans votre métier comment intégrez-vous la notion de durabilité?
Dans mon métier de la même façon que dans ma vie personnelle, c’est à dire prendre des risques, ne pas chercher des solutions avant d’agir mais sauter dans l’eau et nager.
Dans le cadre de votre métier quels sont les plus grands enjeux auxquels vous êtes confrontés?
De passer de la prise de conscience, des connaissances à l’action. Il y a un proverbe que j’aime beaucoup, je ne sais pas si il est chinois mais il a été trouvé sur le le bureau de Benjamin Franklin il y a très longtemps: « dis-moi j’oublierai, enseigne-moi et j’apprendrai mais implique-moi et je comprendrai ». Et c’est ce gap entre apprendre et comprendre: le comprendre c’est par l’expérience, par l’émotion, donc on passe d’une pédagogie de la transmission à une pédagogie de l’expérimentation et c’est comme ça qu’on apprend.
Quelles sont les solutions que vous envisagez pour répondre à ces enjeux?
De travailler sur cette conscience individuelle. Aujourd’hui on est gouvernés par une conscience collective et cette conscience collective nous conditionne mais ne nous permet pas nécessairement de comprendre. Et c’est seulement pour moi par la conscience individuelle qu’on comprendra et qu’on pourra agir. Mais comme je l’ai dit avant les solutions on ne les connait pas il faut juste construire le pont au fur et à mesure et non pas le dessiner de A à Z avant qu’on puisse commencer la construction. Mais c’est ça les grands enjeux, on parle d’intelligence collective, d’action collective mais je ne crois pas à la conscience collective, elle doit être individuelle et tant qu’elle n’est pas individuelle on n’y arrivera pas.
Qu’est ce que la pandémie a changé dans votre rapport au monde?
Pour moi la pandémie a démontré que quand il y a une volonté l’action est là. C’est absolument incroyable car de manière juste ou pas juste tout le monde a agi, les gouvernements ont agi. Et pourquoi on ne peut pas faire ça pour la prochaine pandémie qui sera bien pire, qui sera celle de la révolte de la nature? Donc on peut agir, on peut arriver vers une solution durable, on en a les moyens et on l’a prouvé avec cette pandémie.
Racontez-moi votre plus beau souvenir de nature.
J’ai passé trois semaines dans une forêt vierge en Tasmanie avec un chaman, on était juste les deux. Pendant une semaine j’étais j’étais seul, je n’ai pas mangé, j’ai bu de l’eau d’un ruisseau qui sortait de la montagne à côté de la forêt, je n’avais ni crayon, ni papier, ni livre, ni téléphone, pas d’écran. J’ai communié avec cette magnifique forêt pendant une semaine et j’ai absorbé toute l’énergie de cette forêt qui m’a accueilli et m’a fait en effet sentir cette sensation d’appartenance, c’était magnifique.
Si vous deviez être un arbre lequel seriez-vous?
Le baobab.
Pourquoi?
Parce que le baobab est un arbre qui n’est pas foncièrement très beau et il est souvent seul. En Afrique, dans les grandes plaines au Mali, j’ai eu l’occasion de voir ces baobabs qui sont seuls sur cette plaine, ils ne sont pas très beaux mais ils sont résilients et le jus du baobab, le pain de singe est un jus absolument magnifique.
Quelle est la capacité et l’aptitude de la nature que vous souhaiteriez avoir?
D’être interconnecté, être interdépendant, de pouvoir fonctionner dans un monde complexe mais pas compliqué et que tout coule de source malgré la complexité.
Si vous étiez une source d’énergie laquelle seriez-vous?
Celle des rochers, des cailloux.
Pourquoi?
C’est l’énergie que je ressens le mieux, c’est quand je suis sur un caillou, sur des rochers je ressens beaucoup plus l’énergie que dans d’autres endroits de la nature.
Quel est votre saison préférée?
L’automne.
Pourquoi?
C’est la préparation de la nature à la résilience. L’hiver arrive, il faut se renforcer, il faut renforcer son système immunitaire, il faut créer cette résilience et j’aime bien cette préparation à la résilience.
Quel est votre paysage préféré?
La forêt, la forêt dense avec peu de visibilité mais une biodiversité abondante et une explosion de différentes plantes, plutôt vertes.
Que signifie préserver la planète pour vous?
C’est l’aimer, c’est avoir énormément d’empathie.
Quelle pollution vous insupporte?
Celle qui détruit les aliments agricoles.
Quelle solution pour la planète attendez-vous avec impatience?
Celle de la diversité, celle des solutions locales. Qu’on ne cherche pas la solution mais qu’on cherche une multitude de solutions. Celle qui est amenée localement par des individus qui chacun travaillent une partie de la terre ou des murs ou de leur habitat.
Quel est le geste anti-durable que vous peinez à abandonner?
Voyager.
Et le péché anti-écolo qui vous inspire le plus d’indulgence?
La voiture, les émissions par les voitures.
Qu’est-ce qu’on ne trouve plus du tout dans votre cuisine?
Les aliments qui ne sont pas bio ou biodynamiques ou locaux.
Quel geste pour l’environnement vous fait du bien?
Finir ce qui est sur mon assiette et finir ce qui est sur l’assiette des autres.
Quel préjugé sur les écolos avez-vous abandonné?
Que ce sont des personnes qui rêvent mais qui sont éloignées de la réalité.
Quel est votre plus grande contradiction?
J’ai deux motos et un bateau à moteur.
Quel est votre devise durable?
Revenons à l’intention initiale d’une activité, que ce soit l’intention première d’investir, apprendre. C’est l’éloignement de cette intention première où les moyens deviennent la substance et la substance devient les moyens.
Quelle est votre idée du bonheur?
Le partage avec d’autres personnes qui ont les mêmes convictions, les mêmes compréhensions que moi.
Et celle du plaisir?
Trouver les solutions et mettre en réalisation un projet.
Comment pouvons-nous selon vous agir à un niveau individuel pour faire la différence?
Sortir de ses zones de confort, ne pas avoir d’indice de référence, de réfléchir autrement et de repenser ce que c’est vraiment le bien-être. Est-ce que ce bien-être est absolu ou il est toujours relatif à d’autres.
Et d’un point de vue collectif?
Uniquement dans l’action mais pas trop dans la réflexion, pas trop dans la pensée et ne pas dépendre trop de la science.
Pourquoi?
Parce que je pense que la science ne répond pas à tout et la science des fois apporte une certaine arrogance: ce qui est créé par l’homme a plus de valeur que ce qui est créé par la nature et ce qui est connu a plus de valeur que ce qui est pensé ou imaginé.
Quelles sont de façon plus réaliste les trois choses indispensables à accomplir ou à faire pour changer le monde?
Trouver des solutions pour éviter le gaspillage, je pense que si on évite le gaspillage on a fait un pas énorme dans ce chemin vers une planète sûre.
Deux, c’est tout ce qui concerne l’alimentation qui est étroitement liée à la santé, donc ça nous amène à prévenir plutôt que guérir. On a mis de la valeur à guérir mais en fait il faut venir vers la prévention.
Et la troisième chose c’est de valoriser la nature, ce qui n’est pas nécessairement fait par l’homme. On est prêt à dépenser des millions pour un tableau d’un paysage mais on ne veut pas dépenser beaucoup d’argent pour préserver ce paysage.
A quoi devrait selon vous ressembler le monde de demain et les communautés qui le constituent?
De ne plus être dans une certaines formalité dans l’apparence, donc pouvoir travailler dehors, avoir des réunions dehors, ramener tout dehors, les écoles, la culture, les interactions. Même si ce lieu où nous sommes est absolument magnifique mais pourquoi est-ce qu’on ne peut pas faire plus dehors? Donc c’est repenser nos activités à l’extérieur.
Merci beaucoup Guillaume.
Merci Zelda.
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